La communication non violente consiste à s’exprimer sincèrement et clairement, en portant sur l’autre un regard empreint de respect et d’empathie. (Marshall Rosenberg)
Trop souvent, avec des collègues au travail ou avec les membres de notre famille, de simples dialogues se transforment en conflits.
Pourtant, de tels désaccords proviennent souvent d’un simple problème de communication.
Pouvons-nous remédier à ces difficultés avant qu’elles ne se présentent ?
C’est le genre de petit miracle que la communication non violente vous aidera à réaliser.
Une manière plus saine de communiquer
La communication non violente, ou CNV, a été développée dans les années 1970 par Marshall B. Rosenberg, docteur en psychologie clinique de l’Université du Wisconsin.
La CNV s’inspire aussi des travaux des psychologues Carl Rogers et Abraham Maslow ainsi que de l’ahimsâ (« non-nuisance »), un concept religieux qui réfère notamment au mouvement de non-violence mis de l’avant par le Mahatma Gandhi.
Selon Marshall Rosenberg, la communication non violente favorise « une qualité de relations qui permet de répondre aux besoins des uns et des autres en étant uniquement motivé par l’élan du cœur et la joie de le faire. »
Ainsi, communiquer n’est plus un acte banal mais une manière privilégiée de tisser des relations respectueuses et durables avec nos semblables.
Valoriser l’ouverture et le respect des différences
La communication non violente suppose de nous ouvrir d’abord, de tenter de communiquer réellement et de manière authentique, et de respecter profondément les autres.
Pour l’utiliser, nous devons d’abord viser à transmettre un message de la manière la plus claire et constructive possible, et non pas à gagner une guerre menée par l’orgueil.
La communication peut ainsi aider à transmettre un message plus difficile, plus exigeant au niveau émotionnel, et contribuer à assainir les relations.
Michel Fize, sociologue au CNRS en France et auteur de nombreux ouvrages, s’intéresse à la CNV depuis plusieurs années.
Selon lui, tout échange entre deux ou plusieurs personnes risque de souligner des différences.
Or, c’est souvent la perception de ces différences qui suscite la violence.
« Pour communiquer de manière non violente, nous devons d’abord valoriser l’amour et le respect d’autrui.
Nous pouvons accepter l’autre dans tout ce qu’il est même s’il est singulièrement différent de ce que nous sommes », dit-il.
« La non-violence au niveau de la communication doit être un désir.
Elle permet d’accepter de ne pas être en accord avec l’autre sans lui imposer notre volonté; elle consiste à refuser la domination même si l’autre résiste à ce que nous sommes », ajoute-t-il.
La communication s’inscrit dans la dynamique même de la démocratie, c’est-à-dire le dialogue et la capacité de confronter des idées de manière paisible et constructive. (Michel Fize)
La CNV suppose d’être à armes égales lorsque nous formulons des mots et des pensées, car la violence devient trop souvent la « solution » lorsque nous sommes incapables d’argumenter.
Et si la violence est la force des faibles, elle ne permet surtout pas de communiquer réellement quoi que ce soit, à part de l’animosité, et elle n’occasionne que des conflits.
C’est la raison pour laquelle, selon Michel Fize, nous devons d’abord prendre le temps de connaître les autres pour les comprendre: « Ce n’est que lorsque nous avons compris toute la richesse de l’autre que nous pouvons espérer communiquer. »
Il recommande aussi que l’on enseigne à échanger les idées et à argumenter dès l’enfance.
Je suis absolument d’accord avec cette proposition.
Ce n’est pas parce qu’une autre personne n’est pas d’accord avec nos idées qu’elle nous rejette personnellement, une confusion que nous faisons trop souvent au Québec…
D’où l’importance de chercher à communiquer vraiment, mais aussi à prendre le temps d’écouter les autres.
Développer sa bienveillance
La bienveillance consiste à éprouver un sentiment de bonté et d’ouverture à l’égard des autres.
Elle va de pair avec l’empathie et contribue à pacifier les relations.
La CNV suppose qu’avant de communiquer, notre état d’esprit soit paisible et que nous désirions établir des relations saines.
Ainsi, au lieu de parler machinalement, sans véritablement porter attention à l’autre, nous choisissons les mots et le ton que nous employons avec attention, en prenant conscience des besoins et des émotions que chacun vit.
La CNV permet ainsi d’être réellement attentif à l’autre et à nous-mêmes dans les relations.
Les quatre étapes de la communication non violente
La CNV se décompose en quatre étapes. Chacune de ces étapes est très importante et vient compléter les autres.
Prenez le temps de vous familiariser avec chacune d’elles et votre communication en sera transformée !
1. L’observation
La première étape est celle de l’observation de la situation de communication.
Elle peut se résumer ainsi: j’observe un comportement qui affecte mon bien-être.
Pour mieux comprendre, voici un exemple.
Imaginez un agent de service à la clientèle qui répond à un client.
Ce dernier, déjà très endetté, exige à l’agent un crédit qu’il ne peut obtenir et, à mesure qu’il se heurte au refus, il devient agressif et frise le manque de respect…
Le préposé lui répond: « Vous pouvez me parler de manière respectueuse, tout comme je le fais, car je n’y suis pour rien dans ce qui vous arrive. »
À cette étape, il faut faire très attention aux messages non verbaux (soupirs, intonation de voix): le but est de rester près de la réalité « objective » (des faits).
2. Les sentiments
Dans cette seconde étape de la CNV, vous vous questionnez sur votre état émotionnel relié à la situation et vous exprimez vos sentiments.
Je vais reprendre mon exemple.
Le préposé ajoute: « Je me sens en colère moi aussi car je n’aime pas me faire répondre comme cela… »
Il est très important de commencer la phrase par « Je » afin de prendre la responsabilité de ce que vous vivez et de l’indiquer clairement.
3. L’expression du ou des besoins
La troisième étape consiste à cerner les besoins, les désirs et les valeurs qui ont éveillé les sentiments, chez vous-même ou chez votre interlocuteur.
Cette étape permet aussi d’exprimer le désir de communiquer de manière non violente: « Nous ne pouvons pas éliminer votre situation désagréable, mais le fait de parler respectueusement nous simplifierait la vie à tous les deux. »
Soyez à l’écoute de vos besoins et de ceux des autres qui sont à l’origine de la situation problématique.
Cette écoute et cette empathie vous aideront à éviter que les émotions négatives n’enveniment la situation.
4. La demande
La quatrième et ultime étape de la communication non violente consiste à demander à l’autre de contribuer au bien-être mutuel dans la relation.
Elle permet de renforcer le « pacte de CNV ».
Pour terminer avec mon exemple, l’agent de service à la clientèle dirait alors: « Si vous êtes d’accord, nous nous adresserons l’un à l’autre avec respect à l’avenir.
Cela évitera de rendre encore plus désagréable une situation qui l’est déjà pour vous, j’en suis bien conscient. »
La CNV selon les contextes
J’ai conscience que mon exemple est assez froid: le service à la clientèle ne représente pas la richesse des relations plus importantes que nous entretenons avec les autres.
La CNV prendra donc différents visages, et il faut beaucoup se pratiquer pour arriver à l’utiliser effacement.
Et encore faut-il que la personne avec qui nous discutons ait un minimum d’ouverture.
Car même si vous employez le meilleur outil, si vous le faites « dans les airs », vous n’obtiendrez aucun résultat.
On ne peut pas apprendre à une souris à chanter l’opéra.
Le discernement est donc de mise…
Voici donc un autre exercice pour vous pratiquer à bien communiquer avec les autres
Voici une liste de situations à travers lesquelles une personne peut bien communiquer avec les autres ou, au contraire, très mal communiquer et favoriser les conflits.
Pour chacune de ces situations, notez ce que ferait une personne si elle communiquer bien en utilisant la CNV.
1. Les autres répètent souvent à Marie qu’elle possède certains défauts sur lesquels elle gagnerait à travailler. Lorsque les gens lui font ces critiques constructives, elle ne peut s’empêcher de se sentir comme si les autres l’attaquaient. Mais Marie valorise aussi l’amélioration personnelle.
- Que fait Marie pour améliorer sa communication et ses rapports avec les autres ?
2. Éric est d’un naturel « rationnel ». À chaque fois que les autres lui exposent leurs problèmes et leurs émotions, il ne fait que leur adresser ses conseils. Les autres sentent qu’Éric ne les écoute pas vraiment.
- Que fait Éric pour améliorer sa communication et ses relations avec les autres ?
3. Francine est une femme introvertie. Elle n’aime pas les discussions, parle peu, ne donne guère son opinion et, par-dessus tout, elle a peur des conflits. Elle se sent souvent frustrée de ne pas exprimer davantage qui elle est et les autres ne semblent pas se préoccuper tellement de sa personne et comprennent souvent mal ce qu’elle veut dire.
- Que peut faire Francine pour améliorer sa communication et ses relations avec les autres ?
- Quelles seront les pensées et les réactions de Francine si elle maintient son statu quo ?
Si cet article vous a plu, sachez qu’il est tiré de mon livre Se poser les bonnes questions. Vous pouvez vous le procurer en version ebook pour le lire en entier.
Considérez-vous que vous avez de la facilité à communiquer avec les autres en leur exprimant du respect ?
Vivez-vous souvent des conflits ?
Utilisez-vous déjà la CNV ou pensez-vous essayer de l’utiliser ?
J’ai hâte de vous lire et de vous répondre dans les commentaires !
Marie-Lise a écrit
Bonjour,
J’ai vécu une situation de conflit avec ma sœur il y a deux ans qui m’a fait beaucoup réfléchir et me questionner sur ma propre violence dans cette situation… Croyant faire le bien, j’ai dénoncé (en prenant à témoin les enfants de ma sœur par mail) l’imposture de son compagnon qui vit au Maroc et dont l’attitude et les faits au fil des années penchent du côté de l’abus psychique d’une personne et de manipulation. Je me suis adressée à ses enfants, qui sont des adultes, en accusant le compagnon de leur mère d’imposteur et de manipulateur et je leur ai demandé de m’aider à sortir leur mère de cette relation terriblement toxique.
Ils ne m’ont pas suivie, ses deux filles surtout, considérant à juste titre qu’elles n’avaient pas à interférer dans la vie privée de leur mère. J’ai agis de telle façon car j’étais effrayée du danger qu’une telle relation puisse avoir avec le temps pour ma sœur. Un acte manqué de ma part à permis à ma sœur d’avoir connaissance de ma démarche, s’en est suivi une réaction de sa part d’une très grande violence dont les effets sur moi ont été très pénibles sur de très longs mois ensuite.
Cette histoire privée, familiale, m’a fait perdre pour un long moment beaucoup de mes repères. Était-ce une bonne chose ce que j’avais tenté de faire ? Les effets racontent plutôt le contraire. J’ai encore sa voix dans mon oreille quand ma sœur m’a appelé sous le coup de la colère, et alors tu te sens mieux d’avoir voulu mon bien malgré moi ? Tu appelles cela me respecter ? Tu dis m’aimer ? etc.
Je ne me souviens pas d’avoir vécu dans ma vie une telle situation de conflit. Je n’aime pas les conflits. J’aime les relations harmonieuses, j’aime la paix, j’aime qu’on puisse partager dans des conditions saines et respectueuses. Cette histoire m’a fait me regarder sous un jour qui ne me plaisait pas du tout: comment, toi, Marie-Lise, tu as été dans le jugement ! Tu as blessé profondément ta sœur, tu n’as pas su faire, etc. Les effets pour moi ont été culpabilité entre autres et perte de confiance en soi.
Je me suis beaucoup interrogée, comment faire autrement dans une telle situation ?
Comment dire non (c’était moi que ma sœur avait comme confidente pour raconter toutes les mésaventures que son prince du désert lui faisait vivre…) et je manquais totalement de discernement. J’apaisais les choses, je la rassurais, je lui cherchais des excuses à lui pour la rassurer elle… Quelle maladresse !
La CNV, comme méthode de communication et outil de connaissance de soi, m’intéresse particulièrement. J’y vois un moyen de comprendre, de construire, de remettre de la cohérence après une expérience qui pour moi a eu des effets réellement traumatiques.
D’éclairer toute cette scène, qu’elle devienne lumineuse pour de nombreuses autres scènes et que je puisse ensuite devenir un instrument pour la paix dans les relations humaines.
Merci de votre attention.
Nicolas Sarrasin a écrit
Merci beaucoup pour votre commentaire Marie-Lise.
Je vous souhaite le meilleur.
Ghislaine a écrit
Bonjour Marie-Lise,
J’ai lu avec beaucoup d’intérêt votre histoire. Je vois que ça remonte à 2019. J’espère que les choses se sont améliorées depuis le temps.
Étant coach moi-même et m’y connaissant dans la matière, d’abord je vous félicite de votre questionnement et de vos interrogations. Avant de passer à la CNV, la question qu’il fallait et qu’il faut toujours se poser, c’est «Est-ce que la personne m’a demandé de l’aide?» (qu’elle soit la sœur ou la maman ou l’enfant).
On se sent parfois le devoir de partager avec nos proches parce qu’on les aime mais malheureusement, s’ils ne le demandent pas, il va falloir s’attendre à cette réaction. Parfois, même la personne qui vient se plaindre, si elle ne demande pas d’aide, il peut ne servir à rien de lui en proposer. Les gens ont parfois juste besoin d’être écoutés.
Bon courage!