Nos jugements sont l’expression tragique de nos besoins. (Thomas d’Ansembourg)
Nous sommes souvent plus habiles à dire aux autres leurs quatre vérités qu’à simplement leur exprimer ce qui se passe en nous.
Notre tendance à ignorer nos propres besoins nous incite à reporter cette violence sur les autres.
Thomas d’Ansembourg, auteur du best-seller Cessez d’être gentil, soyez vrai! nous aide à débusquer certains comportements inconscients, pour être plus près des autres en étant plus près de soi.
Cesser de porter un masque et être plus authentique
Après avoir été avocat à Bruxelles, conseiller juridique en entreprise et animateur d’une association pour jeunes en difficultés, Thomas d’Ansembourg est devenu psychothérapeute et formateur en relations humaines.
Depuis 1994, il enseigne la Communication non violente de Marshall Rosenberg en Europe, au Québec et au Maroc.
Cessez d’être gentil, soyez vrai! Être avec les autres en restant soi-même est un best-seller qui a été traduit en 26 langues.
Dans ce livre, Thomas d’Ansembourg nous explique combien nous avons appris à être complaisants, à porter un masque, à jouer un rôle en compagnie des autres.
Le plus souvent, nous dissimulons ce qui se passe en nous pour rechercher la reconnaissance et l’intégration plutôt que de nous exprimer tels que nous sommes. En d’autres mots, nous avons appris à nous couper de nous-même pour être reconnu des autres.
Voici comment, selon lui, nous pouvons développer notre authenticité pour entrer en relation avec les autres tout en restant nous-mêmes.
Nicolas: Dans votre livre, vous parlez de masques que nous portons en société. En quoi consistent-ils ?
Thomas d’Ansembourg: La plupart du temps, les masques résultent de nos conditionnements éducatifs, ceux de la famille, de l’école, du travail et même de la religion.
Nous avons appris certains réflexes qui nous servent et nous permettent de nous intégrer, d’être reconnu mais qui, parfois, nous enferment et nous empêchent de vivre avec l’être unique que nous sommes.
De là vient l’importance du discernement, de vérifier régulièrement si nos comportements correspondent à notre être profond ou si nous sommes en suradaptation face aux attentes extérieures, par peur de perdre l’intégration, l’adaptation et l’appartenance que nous avons si chèrement acquises.
Nicolas: Avez-vous un exemple des conséquences néfastes de ces masques ?
Thomas d’Ansembourg: Un bon exemple est celui de la personne qui a du mal à dire non. Elle adopte cette attitude pour se faire une place auprès des autres.
Elle est gentille, généreuse, elle est la personne sur qui on peut compter, autant de dimensions qui servent son sentiment d’appartenance.
Mais le problème, c’est qu’à force d’accumuler les « oui » alors qu’elle pense « non », elle n’en peut plus !
Elle peut user de son discernement pour se demander pourquoi elle acquiesce aux demandes de tout le monde.
Elle pourra ainsi constater que ce qui l’a servie par le passé lui nuit aujourd’hui et qu’en voulant se faire respecter de tout le monde elle manque de respect à la première personne dont elle a la charge, elle-même.
Nicolas: Vous parlez aussi du fait que nous sommes coupés de nous-même, de nos sentiments, de nos besoins. Pourquoi cela se produit-il ?
Thomas d’Ansembourg: Parce que, la plupart du temps, nos éducations nous ont tiré hors de nous-mêmes avec les plus belles des intentions du monde…
On nous a rarement dit « Écoute-toi », « Quand tu es triste, tente de comprendre ta tristesse, ta colère ».
Avec de bonnes intentions, nous nous sommes coupés du langage de la vie intérieure pour suivre le programme de la société.
Ainsi, pour nous intégrer, on nous a fourni une panoplie de repères extérieurs mais peu ou pas de repères intérieurs.
Et je constate que même ceux qui ont grandi dans une éducation religieuse, ce qui est mon cas, ne reçoivent pas tellement de repères intérieurs.
Par exemple, la religion catholique propose des modèles comme Jésus, la vierge Marie ou les saints.
Pourtant, la vie spirituelle se nourrit grâce à une écoute intérieure, et cette écoute nécessite des clés que nos éducations ne nous ont pas données.
Nicolas: Pouvez-vous nous parler de ces clés fondamentales qui nous manquent ?
Thomas d’Ansembourg: Le fait de s’asseoir avec soi-même, de rester en silence en est un exemple.
Lorsqu’un enfant est rêveur, nous avons tendance à lui dire de ne pas rester là à ne rien faire.
Ce genre d’interventions nous ont tirés hors de cette fréquentation de l’intime en nous-même.
Ainsi, avec le temps, nous avons encodé le fait que nous ne pouvons pas être nous-même au milieu des autres.
Nous avons été conditionnés à être gentils au lieu d’être vrais, c’est-à-dire à répondre aux attentes des autres pour ne pas rester seuls.
Nicolas: Et comment pouvons-nous prendre conscience de ce que nous vivons vraiment, hors de ces conditionnements ?
Thomas d’Ansembourg: En nous arrêtant sur ce que nous faisons, en devenant le spectateur de ce que nous vivons et non pas seulement l’acteur.
Ce travail intérieur s’effectue en faisant régulièrement des « arrêts sur images » sur notre vie, en nous interrogeant.
Par exemple, nous pouvons nous demander « Pourquoi suis-je en réaction ? », « Pourquoi ai-je pensé à cela ? », « Qu’est-ce qui m’a stimulé ? », « Qu’est-ce qui m’appartient ? », « Qu’est-ce qui appartient aux autres ? »
Ces questions favorisent le recul et nous aident à développer notre intériorité.
Nicolas: Quelle est l’importance de prendre conscience de ce que l’autre vit vraiment et que pouvons-nous faire pour y parvenir ?
Thomas d’Ansembourg: Un enjeu principal de la communication qui a été oublié est l’écoute. Beaucoup de gens croient communiquer parce qu’ils racontent…
Et il y a plusieurs raisons pour lesquelles nous n’écoutons pas: nous n’avons pas appris, nous ne disposions pas de modèles sains, comme celui d’une grand-mère aimante et attentive.
Nous avons surtout eu des modèles d’action et il est rare que nous nous soyons sentis profondément écoutés, ce qui aurait contribué à développer notre capacité d’écoute.
Nicolas: Avez-vous des stratégies à nous proposer pour améliorer notre écoute des autres ?
Thomas d’Ansembourg: Voici deux facteurs qui ont pu diminuer notre écoute et sur lesquels nous pouvons travailler.
D’abord, notre capacité d’écoute de l’autre est fonction de la capacité d’écoute de nous-même.
Nous restons incapables d’écouter la souffrance de l’autre tant que nous n’avons pas appris à pacifier la souffrance en nous.
Par exemple, si nous n’écoutons pas la colère de l’autre, c’est parce que nous n’avons pas appris à écouter notre propre colère.
Si nous ne pouvons écouter la tristesse sans essayer de consoler, c’est parce que nous avons du mal à écouter notre propre peine.
Le deuxième facteur qui nuit à l’écoute découle du fait que, lorsque nous écoutons les besoins des autres, nous nous croyons obligés de les satisfaire.
Pourtant, nous ne sommes pas automatiquement responsables de la satisfaction des besoins des autres si nous les écoutons.
Nous pouvons apprendre à écouter véritablement en nous sachant capables d’écouter les besoins des autres sans pour autant ressentir la nécessité de les « sauver ».
Nous pouvons choisir d’aider, mais il s’agit d’un choix et non d’une obligation.
Il est rare que nous ayons encodé ce dont les gens ont le plus besoin, c’est-à-dire être écoutés, simplement.
En effet, le « gentil » en nous a le réflexe de résoudre le problème pour être reconnu, pour se rendre indispensable.
C’est le syndrome de la maman qui console tout de suite au lieu de prendre le temps d’accompagner son enfant dans la souffrance.
Cette maman pourrait demander à son enfant qui pleure dans son lit avant de se coucher: « Est-ce que tu es triste parce que tu voudrais davantage de compagnie ? Tu te sens seul ? »
Ces paroles empathique s’adresseraient directement aux besoins de l’enfant et seraient plus efficaces pour soulager sa peine.
De cette manière, par notre façon d’être, nous pouvons reconnaître les besoins des autres et leur témoigner combien ils sont importants sans pour autant être obligés de les satisfaire.
Il s’agit d’être vrai !
Nicolas: En terminant, pouvez-vous nous partager une autre stratégie que vous présentez dans votre livre pour améliorer nos relations et notre communication avec les autres ?
Thomas d’Ansembourg: Une excellente stratégie consiste à rester branchés sur nos intentions.
En relation, notre intention est-elle vraiment de rencontrer l’autre ou de nous faire valoir et d’obtenir de la reconnaissance ?
Cherchons-nous à être heureux avec les autres malgré les différences, les désaccords, ou cherchons-nous à avoir raison ?
Nous pouvons sortir de cette confusion tragique qui nous fait prendre nos désaccords pour du « désamour ».
Pour être heureux en relation, nous pouvons nous assurer que notre intention est bien de rencontrer les autres tels qu’ils sont et non tels que nous voudrions qu’ils soient.
Il y a plus de joie à tenter de résoudre nos conflits qu’à les aggraver.
Je vous recommande la lecture de son excellent livre
- Thomas d’Ansembourg, Cessez d’être gentil, soyez vrai ! Être avec les autres en restant soi-même.
Avez-vous lu cet excellent livre ? Si oui, qu’en pensez-vous ? Qu’est-ce que ce livre (ou cette entrevue) a pu vous apporter concrètement pour vous aider dans votre vie et vos relations ? Les commentaires ci-dessous sont là pour vous !
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